“Vue(s) d’Afrique” : la rencontre par la différence, par Dédy Bilamba
À l'occasion de la cérémonie des Césars 2020, l'actrice franco-Malienne Aïssa Maïga, que nous avions eut l’occasion de recevoir lors de la 30ème édition de Vues d'Afrique, débute son intervention avec la phrase : “On est une famille, on se dit tout non ?".
Quelques mots qui décrivent une réalité qui résonne à travers le monde, et que l'on présente souvent à travers la notion de « problématique de diversité ».
Au Québec, où nous sommes basés, cette question est parfois bousculée par l'actualité étasunienne avec des mouvements comme "Black Live Matters", ou des constats similaires face à l'industrie du cinéma, et de la culture en générale.
Et bien pour nous, le Festival Vues d'Afrique, le sujet de l'inclusion ou de la diversité, n'est pas une problématique à résoudre mais un choix agréable. En effet, il est évident pour nous que le fait d'aller à la rencontre de l'autre et surtout lui donner l'espace nécessaire pour s'exprimer et partager sa culture, est une opportunité à saisir, pour soi-même et pour la collectivité.
Certes, l'un des déclencheurs de la création de Vues d'Afrique dans les années 90 était l'absence et surtout le manque de considération du cinéma africain dans l'espace culturel Nord-Américain. Parfois considéré comme une sympathique escapade culturelle ou un aparté porté par des passionnés, voire des « militants ».
Alors oui, nous avons fait le choix à travers ce rendez-vous, non pas de mettre en lumière les talents qui brillent déjà par eux-mêmes, mais de contribuer à ouvrir les yeux de nos amis, voisins et collègues québécois.
Après 36 années d’existence, si la qualité artistique et l'opportunité de s'enrichir culturellement sont les sentiments principaux qui marquent les fidèles de Vues d'Afrique, force est de constater que le sujet reste une problématique pour certains.
Alors que le monde entier était contraint de se cloîtrer du fait de la pandémie, le Vues d'Afrique a fait le pari un peu de faire une mutation osée en passant à 100% au numérique. Un pari un peu fou à cause des très courts délais et du fait qu'il s'agissait d'une première, alors que la tendance était à la « prudence » en annulant tout simplement.
À ce titre, lors de conférence de presse téléphonique, alors que nous répondons aux nombreuses questions des journalistes, l'équipe de programmation de Vues d'Afrique était encore à pied d'œuvre pour convaincre les producteurs, réalisateurs et autres distributeurs à « embarquer » dans l'aventure. Idem, pour l'équipe de TV5 Monde, qui en plein confinement devait trouver le moyen technique d’accueillir la trentaine de films sur leur plateforme.
C'est alors que dans la « jungle » des offres de contenu cinéma sur internet, ce rendez-vous que l'on imagine réservé à des « africophiles » passionnés, a touché des dizaines de milliers d'internautes à travers le Canada. Quoi de plus gratifiant que de recevoir des courriels de remerciements, provenant d'Abitibi ou d'Ontario, de la part de personnes qui jusque-là ne pouvaient qu’imaginer de loin, le plaisir de voyager avec la programmation de Vues d'Afrique.
Une satisfaction, qui nous rappelle l'autre, où la différence n'est pas toujours le problème, mais plutôt l'opportunité de se rencontrer.
De la même manière que le 36ème Vues d'Afrique s'est invitée chez les internautes canadiens de manière naturelle, sans slogan ni pancartes, il est important de garder les yeux ouverts, afin de s'enrichir mutuellement.
La prochaine édition du Festival international de Cinéma Vues d'Afrique sera hybride (en ligne et en salle) et se tiendra à Montréal du 09 au 18 avril 2021.