“Sous la fibre”… artistique québécoise : un podcast inspirant qui fête déjà ses 4 ans d’existence!

Prêt.e.s pour une plongée sensorielle au cœur de l'effervescence artistique québécoise? Sous la fibre, c'est le podcast tout doux qui donne la parole aux merveilleux talents visuels d’ici. Véritable bulle d'art accessible à toutes et à tous, il nous entraîne dans une odyssée vibrante où la créativité s'exprime librement, sans tabous! Et pour célébrer ses 4 ans d'existence (déjà?!), MR-63 a choisi d’inverser les rôles en prêtant notamment sa voix à l’inspirante Claire-Marine Beha, réalisatrice et créatrice du podcast. Tout au long de ce riche échange, explorez avec nous les coulisses de ce projet à l’histoire passionnante, qui nous offre une immersion unique sur les motivations profondes de Claire-Marine derrière chaque épisode.

Peux-tu te présenter brièvement? Et nous parler de ton parcours en tant que créatrice et réalisatrice du podcast Sous la fibre?

C-M : “Oui bien sûr! C’est vrai que je suis pas habituée à être l’interviewée, en général c’est moi qui tends le micro, autant avec le podcast que dans mon travail au quotidien. Alors moi c’est Claire-Marine, je suis journaliste depuis maintenant 8-9 ans. Présentement je travaille pour Radio-Canada, puis j’ai aussi été pigiste auprès d’Urbania, du Journal Métro, la Gazette des Femmes, ELLE Québec… fait que c’est à peu près ça. Sinon, le podcast a fêté ses 4 ans le 12 janvier, quand même! C’est passé vite et en même temps la pandémie a pas mal perturbé mon rapport au temps.”

Raconte-nous, comment s'est déroulé le grand saut dans l'univers du podcast? C’est un projet que tu portais depuis longtemps?

C-M : “En effet, j’y ai pensé longtemps avant de me lancer. Je murissais la réflexion depuis 2018 et me suis officiellement lancée en 2020. À l’époque, l’univers du podcast était pas aussi démocratisé qu’aujourd’hui. C’était surtout de grosses productions, de gros diffuseurs. Il y avait moins d’indépendants, sauf en Europe où ça s’est davantage développé. Au Québec, on avait pas encore les deux pieds dedans comme présentement, fait que j’y pensais beaucoup mais j’avais peur, j’étais super anxieuse à l’idée de me lancer. Je suis pas quelqu’un qui aime se mettre de l’avant même si au final je reste dans une posture journalistique. Il fallait que j’assume plein de choix, les invités, les sujets à traiter, la ligne directrice… Je voulais relever le défi de parler d’art visuel à travers le médium sonore, ce que je trouvais super intéressant et challengeant, un peu comme un outil de médiation.

Souvent, on se pose devant des oeuvres en se disant “à quoi l’artiste a bien pu penser en créant cette oeuvre?”, “quel a été son processus créatif?”, “une oeuvre autour de la mort, qu’est-ce que ça véhicule?”. Ce sont toutes des questions que j’ai depuis petite. Je me suis rendue compte que le support audio est parfait pour avoir une immersion totale dans le parcours des artistes. Je l’ai essayé et de toute évidence, j’ai persévéré.”

Qu'est-ce qui t'inspires dans le fait de donner la voix aux artistes québécois.es? Et pourquoi les arts visuels spécifiquement?

C-M : “J’étais journaliste quand j’ai commencé mon podcast. Je travaillais beaucoup en culture. J’avais déjà réalisé des entrevues avec des artistes visuel.les puis faut dire que j’aime l’art visuel depuis toujours. J’ai commencé ces entrevues à l’époque où j’étais encore à l’Université de Montréal. C'étaient mes mandats préférés. J’adorais parler avec eux, ça faisait écho à toute la curiosité que j’ai depuis enfant.

Pour moi, chaque œuvre est une porte vers un sujet. L’art c’est un peu un prétexte. J’aime full tout ce qui est de l’ordre de l’analyse formelle des oeuvres, les techniques, les médiums, c’est fascinant. Mais j’aime aussi beaucoup les thématiques derrière, comme par exemple la santé mentale. J’ai rencontré une personne qui avait des troubles obsessionnels compulsifs, une personne qui parle de sa transition de genre, une autre du syndrome de l’imposteur... Toutes les facettes m’intéressent. Mon but est surtout d’humaniser l’art visuel, de briser les discours hermétiques où il faut être initié à l’Histoire de l’art pour que ça nous touche. Je suis super ouverte à tous les sujets. Si les artistes invité.e.s veulent parler de leur technique ou d’un souvenir d’enfance qui s’inscrit dans leur processus créatif, j’aurais de la place pour ça.”

rendre accessible ton podcast au au plus grand nombre, c’est un de tes objectifs coeur? comment le traduis-tu?

C-M : “Complètement. En fait, je veux autant m’adresser aux gens qui ont les codes de l’art qu’à celles et ceux qui ne sont pas allé.e.s au musée depuis le Cégep ou le secondaire parce c’était une obligation. J’essaie vraiment de vulgariser au mieux, de donner des définitions, de ramener ça à l’humain et que ce soit écoutable par tout le monde. Montrer que l’art s’adresse à toutes et à tous. Oui, l’art ça peut être un objet physique, une oeuvre, mais c’est aussi une porte d’entrée vers tout un monde. Je parlais tantôt de médiation et bien je pense que ce genre de podcast vient activer un peu les oeuvres d’art qu’on voit passer par exemple dans notre fil Instagram. Qu’au-delà de la qualité artistique, certes pertinente, il y a de l’humain derrière.”

C’est quoi ton processus de création typique d'un épisode de Sous la fibre?

C-M : “J’ai comme des gros buzz de créativité où j’emmagasine beaucoup d’informations après être allée visiter des expos ou des sites internet d’artistes qui m’interpellent. On dirait que tout ça vient former des idées d’épisodes. Je les garde précieusement dans mon cellulaire puis après je fais des choix. Souvent, une idée persiste et vient s’accrocher. Je priorise et m’y investis. Ensuite, je fais les entrevues et à partir du matériel que je récolte, là-dessus je vais pouvoir ajouter du son, aller chercher des musiques qui collent avec l’ambiance et l’univers des thématiques dans lesquelles on plonge. Parfois, quand j’ai le temps, je me déplace et vais dans le studio de l’artiste. C’est important d’avoir une incursion par le son qui habite la création des artistes. Aujourd’hui, c’est le fun car quand j’approche des artistes, c’est souvent qu’ils me connaissent. Ça me fait toujours chaud au cœur, en toute humilité.

Sinon je fais tout, du montage à la prise de son, au design des contenus sur les médias sociaux, à l’envoi des communiqués de presse, des infolettres, etc. J’aime ça faire tout moi-même, avoir cette liberté. Je rentre vraiment dans un vortex créatif. Ça m'est arrivé dans les deux derniers épisodes d’ajouter des extraits sonores d’oeuvres issues des artistes. J’appelle ça un “collage sonore”.

chaque épisode est imaginé sous La même structure éditoriale? laisses-tu une grande part au spontané, à l’imprévu dans tes échanges?

C-M : “Il y a évidemment beaucoup de recherches en amont sur l’artiste. Je prépare toute une série de questions. Je préfère en avoir plus que pas assez mais après oui, il faut manier l’art de la spontanéité. Je dis toujours aux artistes qu’il n’y a pas de bonne ou mauvaise réponse, je leur donne la parole et ne m’attends pas à ce qu’ils ou elles répondent d’une certaine manière. Le but c’est que leur propre personnalité transparaisse dans l’épisode. Je reste 100% flexible. Je leur laisse de l’espace pour ça.

Sinon, disons que j’ai trois types d'épisodes : ceux avec lesquels j’ai commencé, que j’appelle des immersions sonores dans l’univers artistique d’un.e artiste. Après, j’ai aussi des épisodes où j’échange avec des spécialistes du monde de l’art. Récemment, j’ai discuté avec une médiatrice ou encore un galeriste qui me parlait de collections d’art. C’est connexe, ça apporte un autre éclairage. J’adorerais faire des discussions avec des commissaires d’expositions pour démystifier un peu le métier et avoir leur regard. Et enfin, le dernier type, c’est une série que je fais en ce moment, des entrevues avec deux artistes. Le dernier en date parle de corporalité, “Corps dissidents”, d’affranchissement sous différentes manières complémentaires”

Comment choisis-tu les artistes que tu invites? Recherches-tu des critères spécifiques dans ta sélection?

C-M : “Je dirais pas que j’ai des critères spécifiques, si ce n’est qu’iel doit parler en français et vivre au Québec. Certain.e.s vivent parfois entre les deux comme par exemple Camille Ropert de mon dernier épisode qui vit un tiers au Québec, un tiers en Colombie-Britannique et l’autre tiers en France. Et c’est correct aussi. Pour la sélection, j’y vais avec ma sensibilité. J’ai vu beaucoup d’artistes progresser, mais je ne les connais pas tous et heureusement sinon ce serait pas le fun. J’ai un gros line-up de sujets à traiter. Après oui, j’ai des artistes qui m’écrivent et qui aimeraient participer. C’est un beau signe de confiance de la part du milieu! J’essaie de donner la parole à des artistes diversifié.e.s dans leur discipline, leur background, leur personnalité. J’ai tendance à aller vers quelqu’un qui déconstruit les normes du genre et les codes artistiques, plutôt que quelqu’un qui répond à tout ce qu’on attend depuis des siècles.”

Portes-tu un intérêt au fait de mettre en lumière la scène artistique émergente?

C-M : “Bien sûr, je ne me mets pas de limite. Par exemple, l’épisode sur l’autoreprésentation, qui a beaucoup plu, il y a dedans une artiste établie qui a 20 ans de carrière, qui est collectionnée par des musées, qui multiplie les projets. C’est une artiste qui fait de la performance et qui crée aussi des œuvres visuelles mêlant le photomontage et la peinture. C’est Annie Baillargeon que j’adore. Et à côté, je suis allée tendre la main à un artiste émergent, Mikael Lepage, qui est de Drummonville et qui fait aussi de l’autoreprésentation en peinture. Les deux faisaient du sens pour moi. 

Je pense pas qu’il y ait de parcours mieux ou moins bien que d’autres. C’est sûr que quelqu’un qui a commencé il y a 2 mois aura peut-être moins de réflexion et de recul par rapport à son discours artistique, sa démarche. Et c’est normal. Mais parfois, on peut très bien être émergent et avoir accumulé beaucoup d’expérience artistique, de vie, etc. Que l’artiste soit émergent, en milieu de carrière ou établi, je me réfère plus à la sensibilité qui émane de son travail.”

Est-ce qu’il y a des thématiques fortes que tu explores qui reviennent souvent?

C-M : “Honnêtement je ne sais pas trop. Il y a comme des thématiques qui s’imposent un peu à moi. J’ai lancé une infolettre au mois de septembre dernier et dedans, je me permets de parler d’Histoire de l’art et de créativité au sens plus large. Mais c’est sûr que dans mon podcast, on peut clairement déceler que je suis pour déconstruire l’Histoire de l’art, défaire les prérequis. Je pense que c’est pour ça que je donne beaucoup la parole aux artistes qui déconstruisent la binarité des genres, qui parlent de santé mentale, d’injonctions, de reprise de pouvoir de son corps, de l’imagerie des nymphes dans l’Histoire de l’art… Il y a cette colonne vertébrale autour des codes sociétaux, de manière sentie, personnelle, conceptuelle. Une certaine audace, sans que ce soit pour autant militant.”

Sur les 26 podcasts réalisés jusqu’à présent, y a-t-il un moment ou une entrevue qui t'a particulièrement marquée?

C-M : “Évidemment, tous mes intervenants et intervenantes ont une place spéciale dans mon coeur. Après bien sûr, le tout premier épisode avec Sarah Seené qui m’a fait confiance, a une saveur particulière. Mais on dirait qu’à chaque fois que je sors un nouvel épisode, je me dis “ok cet épisode je le trouve bon”. C’est que c’est bon signe, c’est pour ça que je continue. Je dirais que ce qui me marque particulièrement, c’est aller à la rencontre des artistes dans leur studio. Les souvenirs sont plus saillants, même si à distance il y a aussi beaucoup d’échanges et d’émotions.”

après ces 4 années, remarques-tu un impact significatif de ton podcast dans le milieu culturel québécois?

C-M : “Il y a tellement ce culte du vedettariat dans le milieu culturel qui fonctionne avec la musique et l’humour mais moins bien avec la danse, le théâtre, l’art visuel… On en parle très peu dans les médias. Alors que les artistes portent en eux tellement de réflexions. Ils observent la société, se donnent la liberté folle de s’investir et de dévouer leur vie à leur pratique. Je pense pas avoir d’impact significatif dans le milieu mais je me dis qu’à mon niveau, je leur donne la parole.”

est-ce un gros défi pour sous la fibre d’arriver à se démarquer au coeur d’un média en pleine expansion?

C-M : “Stratégiquement parlant, j’ai pas de budget ni d’équipe marketing fait que d’avoir travaillé dans les médias pendant 8 ans m’aide beaucoup. Surtout pour la création de contenus sur les réseaux sociaux. Mais le fait d’être restée après 4 ans, d’avoir une certaine récurrence permet aux gens de me connaître. Je pourrai jamais concurrencer les gros diffuseurs, j’ai pas leur budget et je donne pas la parole à des personnalités publiques. Évidemment, j’aimerais que Sous la fibre ait une portée plus importante tellement les artistes invité.e.s sont brillant.e.s, mais de plus en plus je fais la paix avec ça. C’est correct de raisonner auprès d’une niche d’auditeurs et auditrices. En plus ils sont supers fins, ils m’écrivent pour me soutenir. Ils sont super précieux. C’est plus personnalisé, authentique.”

As-tu des projets futurs que tu aimerais partager? Envisages-tu d'explorer de nouveaux formats ou de nouveaux sujets dans les épisodes à venir?

C-M : “Pour le moment je me permets de prendre la liberté d’aller là où je veux si j’ai l’impression que ça va mettre en valeur la voix des artistes. Au mois de septembre, j’ai lancé ma série Transversal qui est donc une thématique rapprochant deux artistes. Et comme je le disais tantôt, j’ai aussi lancé mon infolettre. C’est une infolettre éditorialisée, où je parle d’autres thématiques comme : “comment observer une oeuvre d’art?”, “le rapport des femmes artistes au textile”. C’est beaucoup de plaisir, un complément écrit qui me stimule beaucoup.”

Quels conseils donnerais-tu à ceux qui aspirent à créer leur propre podcast, en particulier dans le domaine artistique?

C-M : “Quand je faisais des chroniques à la radio, je me rappelle que j’avais la chienne, j’avais comme si peur. Puis au final, tout le monde s’en fout. On est les seuls à se juger vraiment. Les gens prêtent pas attention aux petites erreurs que toi seul peut détecter. Après, pour lancer un podcast, il faut trouver un sujet qu’on aime assez pour pouvoir persévérer. À moins que ce soit un projet très éphémère, ce qui est complètement correct aussi. Comme des mini-séries par exemple. Mais si c’est quelque chose qu’on désire pérenniser, je dirais ça oui, de trouver un sujet qu’on aime assez et de ne pas essayer d’absolument se coller à ce qui a l’air de full fonctionner. Trouver sa propre voix, son propre univers.”

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