Le design graphique à l’honneur : Marie Chénier remporte un award à New-York!

Dans l'univers créatif du design graphique, une étoile montante émerge de Montréal pour aujourd’hui briller sur la scène internationale. Marie Chénier, designer graphique pour le studio Caserne, a récemment conquis New-York en remportant le prestigieux Young Guns 21 Award (on vous en dit plus plus bas!).

Au fil de cette entrevue exclusive, découvrez les coulisses de son parcours artistique, les influences qui ont forgé son esthétique, les moments charnières de sa carrière, notamment après avoir remporté ce prix remarquable, mais pas que! Nous levons aujourd’hui le voile sur notre collaboration inspirante, celle de notre nouvelle identité visuelle, imaginée en partie par Marie, offrant un regard intime sur la synergie créative et les défis qui ont marqué la genèse de ce branding symbolique.

Qu’est-ce qui t’a amené à te diriger du côté du design graphique? Ça a toujours été une évidence pour toi?

M : “Ça a pas mal toujours été une évidence oui. Quand j’étais jeune, un des très bons amis de ma mère était graphiste alors je savais que ça existait, même si j’avais pas vraiment la culture du design, comme la typo par exemple. J’ai plus compris ce que c’était quand je suis arrivée au Cégep. Je savais par contre que je voulais faire un métier créatif. J’ai donc étudié en arts visuels et après une année sabbatique pour réfléchir et voir ce que ça pouvait donner concrètement, c’est là que j’ai décidé d’aller en design. Aujourd’hui j’ai donc obtenu mon DEC au Cégep et mon BAC à l’UQAM.”

Quand tu parles d’arts visuels, tu avais d’autres domaines auxquels tu aspirais?

M : “Ouais, quand j’étais ado, je faisais de la peinture puis je me voyais plus être illustratrice. Mais ça, c’était avant que j’ai toute une culture du design graphique et notamment de la typographie. Quand j’ai découvert cet univers, je me suis vraiment sentie à ma place, alors j’ai un peu mis de côté mes autres pratiques pour me concentrer uniquement sur celle-ci.”

Y a-t-il des designers ou des mouvements artistiques qui t'ont particulièrement influencée dans ton parcours pro? 

M : “Il y en a tellement! Comme mouvements, je dirais le style suisse et le Bauhaus, pour l'aspect intemporel, fonctionnel et démocratique apporté au design. L'Art nouveau, pour ses formes organiques, son équilibre et sa symétrie. Après, il y a aussi le pop art qui m’anime beaucoup. Sinon, j'ai toujours eu un intérêt pour les zines et la culture visuelle des scènes musicales underground des années 60 à aujourd'hui. 

De manière générale, j’ai le goût de rester curieuse, ouverte d’esprit, de me laisser porter par plein d’influences différentes. Tout peut être pertinent selon les projets. En design, on est plus au service d’une idée ou d’un client alors je garde un éventail large de possibilités.”

Qu’est-ce qui alimente ta créativité aujourd’hui? Comment arrives-tu à rester inspirée?

M : “Je dirais qu’il y a d’une part une grosse partie "recherche". Par exemple, suivre le travail de mes studios préférés, créer des tableaux d'inspiration, consulter des médias spécialisés et écouter des podcasts sur le design. Je recommande d’ailleurs Private View(s), The weekly typographic et Ohno Radio pour celles et ceux que ça peut intéresser. Puis, d’autre part, il y a tout ce qui se fait un peu organiquement, comme travailler en équipe, être témoin du processus créatif de mes collègues ou discuter d'un projet de manière informelle. Sortir de derrière l'écran aussi, aller au musée, au cinéma ou même -et surtout- dans l'allée des t-shirts graphiques à la friperie.

À Montréal, on a une très belle scène avec beaucoup d’artistes, studios vraiment le fun donc c’est sûr qu’eux je les suis. Il y en a d’autres super aussi en Europe, en Asie, aux Etats-Unis. Ce qui est drôle, c’est qu’avec Pinterest ou encore Instagram, pas mal tout le monde a les mêmes références de nos jours. C’est tellement plus facile de voir ce qui se fait dans le monde.”

Et tu ne sens pas qu’il y a quand même des tendances, des modes avant-gardistes dans certaines villes ou pays? 

M : “C’est sûr qu’il y a des villes ou des studios particuliers qui sont plus en avant-garde ou qui forgent un peu plus la culture puis les modes en design. Je pense d’ailleurs que Montréal en fait partie, comme New-York, Barcelone ou Paris.”

——

On a appris que tu avais remporté le prix des Young Guns 21 par The One Club for Creativity, toutes nos félicitations! Pour celleux qui ne connaissent pas cette compétition, il s’agit d’un concours international célébrant les jeunes talents créatifs d'aujourd'hui âgés de 30 ans et moins. Et justement, on aimerait en savoir plus à ce propos comme tu es allée récupérer ton prix à New-York la semaine dernière.

Comment te sens-tu après cette semaine riche en émotions? Qu’est-ce que ça représente pour toi, pour ta carrière, d’avoir remporté ce prix? 

M : “Honnêtement, je me sens quand même déjà de retour à la normale, j’ai comme de la misère à capter que tout ça est arrivé, c’est un peu surréaliste. Mais je suis vraiment fière, c’est une belle reconnaissance, un beau défi. Les Youngs Guns est un concours ouvert jusqu’à 30 ans. Cette année, j’ai eu 31 ans fait que c’était comme ma dernière chance. Je voulais absolument essayer avant qu’il soit trop tard. Sans aucune attente, je m’étais dit que si j'arrivais finaliste j’allais déjà être hyper contente. Au final j’ai gagné alors ma joie est évidemment encore plus grande. J’ai mis beaucoup d’effort dans ma soumission, j'espérais vraiment que ça marche. 

C’est quand même un peu un coup de dé car il y a un gros jury, proche de 100 personnes je dirais. Ce qu’il y a de spécial avec ce concours-là, c’est qu’il rassemble plusieurs disciplines, il n’y a pas que des designers, il y a aussi des photographes, des réalisateurs.trices, des illustrateurs.trices… Tout se fait organiquement et de manière équilibrée afin que toutes les disciplines soient primées. Cette année, il y a eu 29 gagnant.e.s.”

Ça t'a pris combien de temps pour soumettre ta candidature?

M : “Ça a été très long. Dans le fond, ça fait moins d’un an que je suis chez Caserne et pour soumettre sa candidature il faut envoyer 6 projets professionnels et/ou personnels. Sur mes 6 projets, j’ai soumis 3 projets de chez Caserne, dont celui de MR-63 justement. Comme c’est un projet qui a été réalisé très récemment, il n’y avait pas d’étude de cas et n'avait pas encore été packagé fait que j’ai enclenché ça tout le mois de juillet, très intensivement.”

Est-ce qu’il y a des personnes ou des mentors qui ont joué un rôle important dans cette étape?

M : “Le gros je l’ai pas mal fait toute seule de mon bord mais j’ai demandé un peu de mentorat à mon directeur de création, Léo, qui m’a donné quelques conseils. C’est aussi Caserne qui a financé ma candidature fait que c’était un bel encouragement. Puis comme j’en parlais à tout le monde, tous mes ami.e.s étaient au courant donc ça m’a comme donné de la force.” 

En quoi ce projet primé se démarque-t-il des autres que tu as réalisés? notamment le Gold Pencil du Circular Design for Fashion remporté en 2022.

M : “C’est sûr que ce prix-là est spécial car il est à moi. *rires*. Les autres prix, ce sont les projets qui ont été primés. Chaque projet résulte d’une collaboration avec des directeurs.trices de création, d’autres collaborateurs.trices. C’était presque tout le temps en équipe. Quand un projet gagne un prix, c’est le projet qui est récompensé, pas tellement toi en tant que créatif. Alors que là, le Young Guns 21, c’est pas seulement un projet mais un portfolio composé de six d’entre eux. Ce prix-là représente mon travail à titre personnel, donc c’est sûr qu’il a quelque chose de spécial.”

Quels enseignements tires-tu de cette expérience? Qu’est-ce que tu dirais aux autres designers qui cherchent à repousser les limites de leur créativité?

M : “Je sais que ça peut être difficile mais c’est aussi un coup de dé. J’irais pas dans le “si tu veux, tu peux” car je pensais pas me rendre là un jour. J’ai vraiment évolué avec le temps. Je pense que ce qui fait que je suis rendue là où j’en suis aujourd’hui c’est que j’ai vraiment du fun à faire ma job. Puis ce concours-là, je le faisais avant tout parce que j’avais du plaisir à faire ma soumission. Je suis super contente de voir que ça a porté ses fruits. J’ai toujours été super passionnée mais je vois vraiment l’amélioration aujourd’hui. Mes professeurs de Cégep devaient pas se dire “cette fille-là va gagner un Young Guns”. C’est donc le fun de voir que quand t’aimes quelque chose, que tu y mets l’effort et le temps nécessaire, ça peut avoir de belles répercussions.”

Est-ce que tu ressens déjà que des opportunités se sont enclenchées suite à ça? 

M : “Tellement. J’ai croisé tellement de beau monde. J’ai rencontré un nouveau client qu’on est en train de faire entrer au studio. Il y a des gens qui m’écrivent, c’est le fun. J’ai de nouvelles connexions par-ci par-là au Québec.”

D’ailleurs, quels éléments de ton portfolio as-tu choisi de mettre en avant? Privilèges-tu les projets locaux?

M : “J’ai pas mal pris mes plus récents projets et ceux qui ont eu une bonne réception. Par exemple, le livre pour lequel j’ai gagné le Gold Pencil. Il est passé par l’étape des concours alors je sais que c’est un beau projet avec une belle mission pour une OBNL. Sinon, mes autres projets étaient principalement ceux de chez Caserne. J’en ai aussi mis un autre réalisé en freelance qui est la pochette d’album pour Guillaume Bordel. Celui-là, je tenais vraiment à le mettre car c’est un peu comme mon projet coeur, j’ai eu l'idée de A à Z et j’en suis vraiment contente. Au final, je me suis retrouvée avec une sélection pas mal diversifiée, qui s’est faite naturellement. Après, je pense que chaque projet est lié à l’autre, comme l’approche typographique et conceptuelle. Au niveau du style, ça représente bien mon travail, même si évidemment les inspirations et la direction artistique sont différentes.”

Dans ton expérience globale, as-tu à coeur de privilégier des projets plus locaux?

M : “J’aime beaucoup travailler sur des projets locaux car c’est vraiment le fun d’être là pour les voir prendre vie à l’endroit où on habite, et d’avoir un impact direct avec notre propre milieu de vie. J’aime travailler avec de plus petites structures qui sont moins de grosses corporations si on veut. Où il y a plus de contact, plus d’humain. Mais à côté de ça, j’aime aussi full travailler pour des projets à l’international comme par exemple le livre pour la Ellen McArthur Foundation. Une super belle fondation avec une belle mission. Le livre a été distribué dans plein de pays dans le monde, fait que j’ai pas un parti pris car je souhaite pas me fermer de portes, même si évidemment j’ai une affection particulière pour les projets locaux.”

En parlant de projets locaux et donc du projet MR-63, qu’est-ce qui t’a le plus motivé dans cette collaboration et ce processus créatif?

M : “À la base je connaissais déjà MR-63 et je trouvais que c’était une énorme chance de pouvoir travailler avec vous parce que j’aime sincèrement votre mission. Je trouve ça super ce que vous faites. Donc déjà en partant j’avais comme une genre de pression. J’ai trouvé ça motivant d’arriver avec une approche très conceptuelle, avec une police de caractère customisée, en plus de la collaboration avec Alexandre Saumier qui est typographe. J’étais vraiment emballée que ça fonctionne. Il y a aussi la manière dont le projet a été accueilli de votre part. On s’est mutuellement inspirés, ce qui a élevé la création.”

Peux-tu expliquer le choix des designs du nouveau branding? comment reflètent-Ils pour toi l'essence de MR-63?

M : “Dans le fond, on voulait vraiment reprendre ce que vous faites déjà, c’est-à-dire interpréter votre mission dans une identité visuelle. C’est tout l’aspect de rendre hommage au patrimoine du métro de Montréal qui rentre en jeu, tout en restant minimaliste pour bien fiter avec l’univers architectural qui est en train d’être développé pour le bâtiment. Le bleu, c’est évidemment le bleu des wagons. La typo, c’est pour rendre hommage au logo à l’entrée des stations, le panneau carré avec la flèche. On a fait appel à Alexandre Saumier pour qu’il puisse extrapoler ces cinq lettres là et en faire tout l’alphabet. Ça a été développé en 2 mois environ. Ces éléments de design, je dirais que c’est un peu une manière de continuer de faire vivre cette culture à travers le projet MR. De revaloriser l’univers du métro montréalais, lui donner une nouvelle vie.”

Trouves-tu que le projet a beaucoup évolué par rapport aux besoins initiaux? Y a-t-il des défis inattendus auxquels tu as dû faire face?

M : “On dirait que ça s’est quand même fait organiquement. Après c’est sûr qu’on s’est posé des questions avant de développer la police de caractère. On a comme jamais trouvé à 100% si le logo du métro de Montréal est un logo customisé par un designer. On sait pas exactement d’où il vient. On a donc fait des recherches là-dessus pour voir si on s'engageait dans une typo déjà existante. Et comme elle a très probablement été personnalisée mais qu'on n'a pas trouvé d’informations concrètes à ce sujet, on a décidé d’en créer une. 

Après c’est sûr que quand on réalise un branding et un guide de normes, c’est rare qu’ils soient déjà mis à l’épreuve. Généralement, y’a pas de grandes évolutions ou de grands changements notoires mais c’est cool d’être rendu à l’étape où on les fait prendre vie, comme sur les médias sociaux ou la signalétique. 

Parce que oui, le fait que le pavillon MR n’existe pas encore et que l’identité est tout de même basée sur le lieu physique, on a dû se fier aux plans d’architecture. Tout au long du processus, on espérait que ça soit acté. C’est arrivé à un certain point où on a dû réévaluer les symboles, car des éléments du plan ont un peu changé de disposition. Les symboles représentent les quatre formes superposées entre chaque étage selon la disposition prévue pour les wagons. C’était donc super important que ça reste fixe. Finalement, tout a bien fonctionné, on a bien hâte de voir comment tout sera agencé une fois le pavillon construit. Avec toujours des adaptations possibles. Aujourd’hui, le système en lui-même peut vivre, peu importe les changements architecturaux.”

Et est-ce qu’il y a des éléments particuliers de notre identité graphique qui te tiennent à cœur et dont tu es particulièrement fière? Pourquoi?

M : “Un peu tout pour plein de raisons différentes. Ce qui est vraiment super avec la marque c’est qu’elle est minimaliste mais chaque petit élément de l’identité a une raison d’être. C’est ça que j’aime le plus. Tout est vraiment bien ficelé et bien pensé. C’est pas une marque tape à l'œil, c’est plus contemporain, minimaliste, calme. Dès qu’il y a un petit quelque chose de spécial, on se pose la question du “pourquoi c’est là?” et on peut y répondre. Par exemple, le fait que la virgule soit montée à la ligne de bord, c’est pour évoquer l’élévation du souterrain de la station de métro. Le traitement typographique avec les tableaux en escalier, c’est très reconnaissable à MR-63 mais aussi super fonctionnel pour de la signalétique, l’élaboration de menus, etc. C’est vraiment ça la force de la marque. 

Par rapport au bâtiment, on a voulu garder le côté très brutaliste des plans architecturaux. Des lignes pures, sobres. Je pense qu’en tant qu’organisation qui travaille dans le domaine culturel et qui met de l’avant des artistes, créateurs.trices, etc., c’est le fun de pouvoir avoir un peu de recul et d’aller dans le minimalisme, aussi pour que la marque puisse bien être représentée dans une exposition ou whatever.

Enfin, est-ce qu’il y a des types de projets ou des domaines spécifiques que tu aimerais explorer davantage à l’avenir?

M : “J'aimerais faire plus de projets dans le domaine culturel ou social, que ce soit pour des théâtres, des musées, des organismes sans but lucratif ou des campagnes de lancement pour des artistes musicaux. Ouais vraiment, je dirais que tout ce qui concerne le domaine culturel me passionne énormément. J’ai hâte de la suite!”

——

Pour MR-63, Marie Chénier représente une source d'inspiration inépuisable pour tous ceux et celles qui aspirent à repousser leurs limites, quand passion et détermination se rencontrent. On vous invite alors vivement à découvrir plus en profondeur son travail pour un coup de coeur 100% garanti!

Site internet | Instagram

Précédent
Précédent

“Sous la fibre”… artistique québécoise : un podcast inspirant qui fête déjà ses 4 ans d’existence!

Suivant
Suivant

Le temps des fêtes à Griffintown : nos adresses favorites pour des cadeaux qui réchauffent les cœurs!